Résolution de problèmes

Résolution de problèmes

L’approche par problème et la résolution de problèmes sont des formules pédagogiques vraiment très proches, parfois utilisées comme synonymes (http://eductice.ens-lyon.fr/EducTice/recherche/scenario/ScenaTice/pedagogies-actives/lapproche-par-resolution-de-problemes).

   

A. Description

Selon Legendre (2005), la résolution de problèmes est une « démarche d’exploration méthodique, volontaire et orientée en vue de trouver une solution à une question préoccupante... ». Selon Gagné et coll. (2005), la résolution de problèmes est définie comme « une activité dans laquelle l’apprenant sélectionne des règles et les utilise pour résoudre un problème dans une nouvelle situation ». De manière assez générique, Poirier Proulx (1999) suggère que la résolution de problèmes est une « stratégie de pensée qui consiste à chercher un cheminement pour réduire l’écart qui existe entre une situation insatisfaisante actuelle et une situation satisfaisante désirée ou un but à atteindre » (p. 35).

  

B. Similitudes et différences avec l’approche par problème

Si certains considèrent approche par problème et résolution de problèmes comme synonymes, nous jugeons utile d’établir une distinction entre les deux variantes de la méthode. Tel que présenté dans la fiche qui y est consacrée, l’approche par problème (APP) est fortement scriptée, réalisée en groupe et suivant des étapes clairement identifiées. Elle est très fréquemment associée aux domaines cliniques en lien avec la santé.

 

La résolution de problèmes est utilisée dans une plus grande diversité de disciplines. Elle puise aux mêmes sources, mais constitue une approche plus ouverte, qui peut être réalisée de manière individuelle ou collective.  

 

La résolution de problèmes et l’APP utilisent toutes deux des problèmes authentiques comme moteur des apprentissages. La première se distingue cependant de l'APP en étant plus souple dans son application, en mettent en jeu des problèmes plus complexes et en nécessitant un transfert de connaissances déjà acquises dans d'autres contextes (Cossette, Mc Clish et Ostiguy, 2004). De plus, l'enseignant confirme ou divulgue les informations nécessaires à la résolution du problème au fur et à mesure que les étudiants discutent et font des liens entre les différents éléments du problème. Pour en apprendre plus sur l'APP, consulter le document complémentaire à ce sujet.

 

C. Description

Merrill (2008) a mis au point un modèle d'utilisation de cette approche pouvant s'appliquer dans divers contextes pédagogiques. Il en a carrément conçu une méthode d’élaboration de programmes et de cours.

 

L’approche débute par un questionnement sur la nature des problèmes qui devront être résolus par les étudiants. L’identification des problèmes est une étape préalable d’une très grande importance. L’idée est de présenter aux apprenants de vrais problèmes, des problèmes « authentiques », qu’ils seront motivés à résoudre. Qu’ils soient sociaux, environnementaux ou liés à des situations professionnelles, les problèmes sont le point de départ de la conception du curriculum. Par exemple, l’identification de problèmes touchant l’environnement peut servir d’appui à un programme de cours en biologie.

 

Il existe différents types de problèmes. Dans la littérature, on distingue entre les problèmes flous (ill-structured problems), qui sont complexes et pour lesquels il peut y avoir une variété de solutions, et les problèmes bien définis, qui ont un nombre très restreint de solutions possibles. Avec les premiers, il faut chercher la « meilleure solution » en fonction des données disponibles et il peut exister une variété de solutions, les experts ne s’entendant pas nécessairement entre eux sur la meilleure (Toussain et Lavergne, 2005). Dans la vie professionnelle, la plupart des problèmes sont des problèmes complexes flous.

 

La nature des problèmes à résoudre variant considérablement d’un domaine à un autre, le processus de résolution variera, se rapprochant tantôt du processus de raisonnement clinique, tantôt d’un exercice beaucoup plus technique. Les stratégies à favoriser pour la résolution du problème vont différer passablement aussi. Selon les résultats de la méta-analyse de Hattie (2008), les enseignants ont avantage à enseigner explicitement les stratégies cognitives et métacognitives, ce qui se conjugue très bien à une approche pédagogique de résolution de problèmes.

 

Une distinction fondamentale doit être établie entre un problème et un exercice, particulièrement dans le domaine des mathématiques et des sciences où de simples exercices sont régulièrement nommés « problèmes », ce qui engendre une certaine confusion. En  mathématiques, la résolution de problèmes est vue comme un processus complexe de modélisation mathématique (Fagnant, Demonty, Lejong et Crahay, 2003) : « Un problème est un exercice de recherche qui constitue pour celui qui s’y attache un défi, qui mobilise ses facultés et aptitudes de compréhension ». Pour Legendre (2005), un problème est un « énoncé d’un ensemble de données mathématique et d’une ou de quelques questions nouvelles à résoudre portant soit sur la détermination d’une ou de quelques solutions inconnues qui peuvent en être déduites logiquement, soit sur le choix ou la conception d’une méthode à suivre et la réalisation des tâches à accomplir pour obtenir une ou des données connues » (p. 1078). Appliquées au domaine des mathématiques, ces définitions d’un problème montrent bien qu’il y a un caractère de complexité et une quantité d’inconnus beaucoup plus grande que dans un exercice. Des exercices particulièrement complexes ont effectivement des caractéristiques qui les rapprochent d’un problème.

 

Déroulement de l’activité

Dans l’approche prônée par Merrill, une fois que les problèmes à résoudre sont identifiés, la méthode se divise en quatre phases : activation, démonstration, application et intégration. Une représentation graphique suit ici les explications de chaque phase.

 

Phase no 1 : activation

Cette phase consiste à effectuer un rappel des connaissances de l’apprenant avant de présenter du nouveau matériel. Pour y arriver, il faut encourager l’étudiant à se rappeler, à rapporter et à décrire les connaissances les plus pertinentes issues de son vécu pour construire ou acquérir les connaissances visées (Merrill, 2002). S’il ne possède pas un vécu lié aux connaissances à enseigner, il faudra lui fournir des cas d’expériences similaires. Ces cas peuvent provenir d'un récit du vécu personnel du tuteur ou de ses pairs (Jonassen, 2002).

 

Phase no 2 : démonstration

Le but de cette phase est d'amener l’apprenant à constater l'utilité des connaissances et habiletés acquises et à acquérir, dans un contexte pertinent, et ce, au moins à deux reprises (Merrill, 2008). La démonstration est composée de trois sous-phases : l’identification des concepts à utiliser, l’exécution d'une procédure utilisant les concepts identifiés et la prédiction du résultat. Cette phase fait appel à la fois aux connaissances déclaratives et procédurales. Lors d'une démonstration, si le résultat obtenu ne correspond pas au résultat prédit, l’exécution de la procédure est révisée jusqu'à l’obtention du résultat voulu. En d'autres termes, la démarche de résolution d'un problème lié à un contexte spécifique, du début à la fin, est fondamentalement un processus itératif. Lors de cette étape, la guidance de l’enseignant est très forte.

 

Phase no 3 : application

La résolution d'un problème à proprement parler se déroule à cette phase. Un nouveau problème doit être résolu par l'apprenant, qui doit utiliser et appliquer concrètement les concepts et procédures préalablement activés, acquis et démontrés. Cette phase est efficace lorsque l’apprenant peut recevoir une rétroaction corrective et un soutien informationnel de l'enseignant, qui, graduellement, se retire pour laisser travailler l’étudiant de manière de plus en plus autonome (Merrill, 2002). Cette rétroaction peut servir à attirer l’attention de l’apprenant sur les éléments essentiels d'un problème, sur son exécution d'une procédure ou encore sur sa prédiction des résultats.

 

Phase no 4 : intégration et transfert

Une fois l'apprenant en mesure de résoudre un problème en utilisant la démarche apprise, il est encouragé à l'appliquer dans une nouvelle situation et à réfléchir à la façon dont cette démarche peut l'aider dans sa pratique quotidienne, de manière à pouvoir transférer ses apprentissages. Pour y arriver, l’apprenant doit avoir l’opportunité de démontrer ses acquis dans son milieu naturel et de discuter de ceux-ci avec ses pairs (Merrill, 2002). Pour approfondir la réflexion de l'apprenant et consolider ses apprentissages, plusieurs options existent : enseigner ce qu'il a appris à ses pairs, verbaliser à haute voix sa démarche au fur et à mesure, se faire tester par ses pairs, élaborer des représentations complexes en utilisant des réseaux de concepts, graphiques ou schémas, etc. (Jonassen, 2004). Au final, durant cette phase, l'apprenant sera en mesure de raffiner ses modèles mentaux, d’écarter des idées fausses et d'augmenter sa flexibilité dans son utilisation de ses nouvelles habiletés et connaissances (Merrill, 2008).

 

Qu’est-ce qu’un bon problème ?

Les problèmes étant centraux à cette approche, ils doivent être bien élaborés, c’est-à-dire appliqués, riches et suffisamment complexes. En d'autres mots, ils doivent contenir un degré suffisant d’incertitude ou d'ambiguïté pour pousser l’apprenant à faire preuve de jugement alors qu'il identifie une solution lui semblant optimale. L'idée est qu'aucun véritable consensus par rapport à la solution ne peut être facilement atteint, car les règles générales pour résoudre le problème, avec des résultats prévisibles, ne peuvent pas être utilisées. L'apprenant est ainsi amené à réfléchir longuement, à échanger avec ses pairs et à prendre une décision qu'il pourra justifier (Jonassen, 1997).

 

D. Avantages et limites de cette méthode

Avantages

Pour l’étudiant

  • Constitue un levier motivationnel et favorise l’implication pour la tâche.
  • Facilite l’acquisition de connaissances disciplinaires et la mémorisation à long terme, et permet de viser des objectifs élevés selon la taxonomie de Bloom.
  • Aide à développer la pensée critique et les compétences de résolution de problèmes complexes transférables à d’autres situations, ainsi que des habiletés cognitives, métacognitives, d’évaluation et d’auto-évaluation, de communication interpersonnelle et de collaboration.

Pour l’enseignant

  • Instaure une dynamique interactive avec les étudiants.

 

Limites 

Pour l’étudiant

  • S’il n’est pas familier avec cette technique, peut être dérouté au début et avoir besoin d’être accompagné.

Pour l’enseignant

  • Préparation exigeante.
  • Requiert beaucoup de temps et de réflexion pour créer des problèmes stimulants et bien adaptés au contexte du cours (objectifs, profil des apprenants, temps disponible, évaluation).  - Oblige à s’assurer que chacun des étudiants apprenne et s’exprime.
  • Devoir être vigilant et désamorcer les conflits éventuels.

E. Conditions d’efficacité de cette méthode

L’enseignant doit être un expert de son contenu afin d’être capable de s’adapter à toute situation en cours d’activité. Il doit être prêt à voir son rôle passer de « transmetteur de savoir » à « accompagnateur d’apprentissage ». Les locaux doivent convenir au travail en équipe. La préparation de l’activité doit être minutieuse et prévoir la mise en place de diverses stratégies permettant aux étudiants de bien se préparer avant les rencontres d’équipes et de structurer leurs apprentissages durant les rencontres. Ceci implique de prévoir les supports et outils qui pourront être utilisés.

L’enseignement explicite des stratégies cognitives et métacognitives à utiliser en lien avec les problèmes présentés est particulièrement indiqué.

 

 

Références 

Gagné, R.M., Wager, W.W., Golas, K.C. et Keller, J. M. (2005). Principles of instructional design (5e éd.). Boston : Cengage Learning.

 

Hattie, J. (2008). Visible learning: A synthesis of over 800 meta-analyses relating to achievement. Routledge.

Jonassen, D.H. (2002). Integrating problem solving into instructional design. Dans R.A. Reiser et J. Dempsey (dir.), Trends and issues on instructional design and technology. Upper Saddle River, New Jersey : Prentice-Hall.

 

Jonassen, D.H. (1997). Instructional design model for well-structured and ill-structured problem-solving learning outcomes. Educational Technology Research and Development, 45(1), 65-95. doi : 10.1007/BF02299613

 

Legendre, R. (2005). Dictionnaire actuel de l'éducation (3e éd.). Montréal : Guérin.

 

Merrill, M. D. (2009). First principles of instruction. Dans C.M. Reigeluth et A. Carr (dir.), Instructional design theories and models (vol. 3, chap. 3). New York : Routledge Publishers. Repéré à http://mdavidmerrill.com/Papers/papers.htm

 

Merrill, M. D. (2002). First principles of instruction. Educational Technology Research and Development, 50(3), 43-59. Repéré à http://mdavidmerrill.com/Papers/papers.htm

 

Toussaint, R. M. et Lavergne, M. H. (2005). Problèmes complexes flous en environnement et pensée réflexive d'élèves du secondaire. Aster, 2005, 40" Problème et problématisation".